Pour bronzer sur mon balcon, je devais chasser les curieux à longue-vue et les libidineux à l’affut qui menaçaient mon intimité. J’aurais bien testé l’arc et les flèches, voire le fusil à lunette, mais c’était trop radical et définitif : j’aurais fini à l’ombre. Pas vraiment l’objectif que je visais. Alors j’ai investi dans une haie de plastique, au feuillage persistant, toujours vert et élégant. Une affaire sur laquelle on tombe assez rarement hors des surplus militaires. C’est comme un paravent, qui laisse passer des filets d’air. Je suis cachée derrière, invisible et parfois nue. Le soleil passe par-dessus. Lorsque je sors de ma tanière, j’ai le teint halé qui me sied. Et si je croise les voisins, à l’heure des poubelles, je vois bien qu’ils sont déçus. Je prends l’air fier et les ignore. Ce n’est pas pour eux que je dore.