Certains jours, ton absence est une brûlure qui m’écaille le derme en copeaux de charbon
Ardente, tu n’appartiens qu’aux rêves qui s’estompent
Aux pénombres reculées de la ville où les chiens jappent aigre après les papiers gras
Ton éclat manque aux ronds-points des zones commerciales abandonnées où je rôde à la nuit
Comment veux-tu que je sois ailleurs : rien ne m’attire, tu n’y es plus
Je ploie sous la vacuité des enseignes éteintes, des reflets mornes ; les vitrines vides me déchiquète la rétine
Je ne vois que toi, partout, entre les poubelles éventrées, les amas de gravats, les restes d’incendies éteints
Tu n’y es pas
Les affiches géantes se décollent en lambeaux promotionnels usagés, on devine un monde qui a depuis longtemps fait faillite, de foire aux lots en soldes d’exception
J’ai dilapidé le stock de bonheur aux coins reculés des parking déserts
Il n’y a plus de réserves et rien ne pousse sur les terres bétonnées
Errent des animaux aux os saillants, à peine capables de mouvements
Il faut survivre là, dans l’iridescence morbide des flaques d’hydrocarbures
Survivre puisque tu n’y es pas
Les panneaux délavés promettent la belle vie, les couleurs ont passé
Une zone pavillonnaire jamais sortie de terre annonce à tout jamais sa qualité de vie exceptionnelle
Terrain vague, zone, friche : personne pour dépolluer notre passé
Par ici la sortie, le magasin de bricolage s’est effondré
Je ne peux vivre ailleurs
J’ai vu passer une famille de sangliers plus heureuse que les caissières démissionnées qu’on croise parfois, hagardes, à la recherche d’un souvenir de leur gloire d’antan
Elles se damneraient pour l’insulte d’un client
L’enfer est déjà là
De tout cela rien ne manque que toi