Je suis un edelweiss, un coquelicot, une ombellifère des bords de chemins, une tulipe, une rose parfois trémière. Une fleur, toujours, fleur de sel, fleur de rhétorique… Et ça me gave. Qu’on cesse de m’en couvrir, de fleurs. Si j’ai une fille, je l’appellerai Raclette, ou Tartiflette. Si l’on est ce que dit son prénom, elle sera grasse et moelleuse, accueillante et réconfortante. Elle trouvera peut-être le choix un peu dur à porter, elle aussi, la blague un rien gratinée, mais je lui parlerai de cette recette de croque-monsieur montagnard, histoire qu’elle n’en fasse qu’une bouchée, des hommes des montagnes. Un prénom, et je lui écris une vie, je forge son destin, je dessine son avenir. Un prénom. Mieux vaut cela que celui d’un martyr qui a bêtement accepté son destin. Mieux vaut cela que celui d’un tyran sanguinaire. Tout vaut mieux que fleur et ses comparaisons faciles. Elle sera Raclette. Ou Tartiflette.