J’envie la mère de famille qui s’empare du chou d’une main ferme et le pose à côté du kilo de carottes dans un caddie encore vide mais qu’on verra déborder au bout du rayon surgelé. Le chou renvoie la célibataire à sa condition. L’achat ne serait pas raisonnable. Il obligerait à consommer le même légume une semaine entière, en soupe, en ragout, en salade ou farci. Même un demi-chou, s’il y en avait, ce serait beaucoup pour moi. Il faudrait que j’invite dans mon petit appartement pour un pot-au-feu à l’ancienne, comme j’en mangeais, le bouillon plein de gras, os à moelle, bouquet garni, poireau. Et, pour les amateurs, ces feuilles de chou gorgée du jus de viande. Mais qui aime encore le pot-au-feu ? Et supporterais-je des jours durant l’odeur qui imprègnerait les tissus ?