Il me faut pour l’hiver une réserve de soleil et de bonne humeur, et de chaleur. Il me faut le goût de l’été pour traverser le froid, et supporter la neige qui s’annonce, et le verglas, et les jours si courts qu’on ne voit que la nuit qui entoure tout de son opacité glacée. Il me faut me réchauffer le cœur et garder la mémoire inscrite au plus profond de l’été qui reviendra quand on aura traversé les brouillards givrants et les gels sournois. Il me faut au creux des assiettes le souvenir des journées au soleil de plomb et des siestes à l’ombre des tilleuls centenaires dans le bourdonnement des abeilles et l’odeur mêlée du thym et du romarin. Il me faut de quoi supporter les congères, les ciels bas qui écrasent les horizons, les arbres nus qui craquent dans les blizzards. Je prépare l’hiver inéluctable et stocke l’été en bocal.
C’est le moment des tomates de jardin à la chaire ferme et goûteuse. Coupée en tranche fine assaisonnée d’un peu de sel fin : quel délice. Bien mûre, elle peut même être épluchée pour garantir une mastication homogène. Après il faudra se contenter des tomates gorgées d’eau et sans goût, produites sous serre. Alors profitons des conserves bien préparées.