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Machines à écrire et à calculer

Sur la photo, ci dessous, on pouvait encore parler d'un zeugme, un zeugme ténu, mais un zeugme tout de même. A l'époque où elle a été prise, on ne pouvait décemment parler, comme la façade de la boutique l'indique de "Machines à écrire et à calculer". Ce n'étaient pas les mêmes. Elles souffraient même d'une différence structurelle quasi indépassable. Mais quasi seulement.

Machine à écrire et à calculer

Le premier clavier sur lequel j'ai tapé était bien celui d'une machine à écrire. Ses petits bras musclés et articulés, frappaient le ruban d'encre qui marquait la lettre souhaitée (en général), sur la page. Je me souviens de la première. Je l'ai toujours. Une robuste petite machine rouge qui a subi mes premières tentatives littéraires.

Rien à voir, par nature, avec une machine à calculer, avec, par exemple, ma première machine programmable (j'ai dû en avoir d'autres, avant, qui ne l'étaint pas). Une Texas Instrument, qui avait 50 pas de programmes de mémoire. On arrivait à faire tourner des jeux là-dedans. Cette machine là date de 1977, je ne sais plus en quelle année j'ai pu en disposer…

Il y avait alors une différence de nature entre la machine à calculer et la machine à écrire : le résultat du calcul était différent des consignes données à la machine, alors que le résultat obtenu sur la machine à écrire était l'image même des consignes qu'on lui avait données. D'un côté, 2+2 donnait 4, de l'autre, 2+2 donnait 2+2. Rien d'autre. Et parler de "machines à écrire et à calculer" relevait bien du zeugme, les deux éléments introduits à la suite de "machines" étant de nature différente : ce n'est pas la machine qui écrit, mais l'homme, alors que ce n'est pas l'homme qui calcule, mais la machine. Grammaticalement, le sujet de écrire et de calculer n'est pas exactement le même. Le sens des deux "à" de l'expression "Machines à écrire et à calculer" ne se superpose pas exactement.

En 1983, j'ai pu faire pour la première fois le lien entre machine à écrire et machine à calculer. J'ai investi dans un TI 99 4 A, une bombe pour l'époque, avec son Basic étendu sur cartouche et un magnétophone où enregistrer les programmes. J'ai alors fait écrire un ordinateur. Et la machine à écrire et la machine à calculer n'ont plus fait qu'un. A partir d'une structure de phrase définie, et d'un dictionnaire de terme tapé à la main, mon micro-ordinateur affichait sur l'écran couleur de la télévision cathodique du salon des lignes de textes, des poèmes en vers libres. Courant 1984, donc.

"Machines à écrire et à calculer" n'était alors plus un zeugme. Et ça l'est de moins en moins.

En 2010, on a vu apparaître les robots-journalistes. Des machines à écrire des articles. Et voilà que l'on apprend en 2011, que ce sont des livres qu'un ordinateur est capable d'écrire.

La fracture, qui séparait l'écriture du calcul, se réduit. Et le zeugme disparaît.

C'est le progrès…

Image CC : Totordenamur

 

1 réflexion sur “Machines à écrire et à calculer”

  1. Ouh là là, que de souvenirs! Décembre 1983, je m’offre une ruineuse extension mémoire de 16Ko et un compilateur basic pour mon TI99, mais aussi le N°1 de SVM, ça change des listings en assembleur. Le TI99 affiche 16 couleurs et des caractères redéfinissables, tout ce qu’il faut pour écrire un jeu de pacman.
    En janvier 1983, internet avait remplacé arpanet, en décembre le monde avait changé, finie la mécanographie et le papier, on entrait dans le monde virtuel.

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