29/3/22
Lecture en se couchant d’une conférence de Gertrude Stein. Sur les littératures anglaises et américaines, et comme elles se partagent la même langue pour en faire deux choses qui n’ont rien à voir. Du mal, comme toujours, avec les généralistation. La littérature anglaise comme une entité dont on pourrait déterminer des constances qui feraient la différence. Depuis mon travail sur la poésie normande qui n’existe pas, bien du mal à accorder du crédit à ces choses-là. Une permanence qui permettrait de dire, ah, oui, ça, c’est de la littérature anglaise, ou américaine, et ce n’est pas la même. Du mal à y souscrire. Idem, dans cette conférence, les idées sur les langues qui, une fois que tout le monde lit et écrit, cesseraient peu ou prou d’évoluer. On voit bien que non. Pas convaincu, donc.
31/3/22
Il y aura toujours eu, surtout eu, des phases de doute et de découragement. Des regrets difficiles à s’avouer à soi-même. Il y aura eu toutes les pages non écrites, tous les textes dans lesquels on n’a eu ni le courage ni la force de se lancer. Le chemin de l’écriture est pavé de ces livres qu’on aurait pu écrire si on avait pris les décisions, parfois radicales, qui aurait créé les conditions favorables à leur aboûtissement. Le chemin de l’écriture des autres parait toujours plus simple, plus rectiligne, plus évident, et, si cela a un sens, plus réussi. Tant qu’on ne discute pas avec l’autre qui avoue aussi ses doutes, ses regrets et, parfois, ses compromissions. Restent parfois quelques pages dont on tire un peu de fierté. Vanité.
1/4/22
Revenir à l’écriture, quelques minutes seulement, revenir à la construction d’un texte fut-il bref, alors même que tout par ailleurs happe l’attention et bouscule, et chagrine parfois, oui, cela remet le corps droit et l’esprit sur les rails. C’est une expérience difficile à partager, peut-être, et il ne s’agit pas de trouver à l’écriture des vertus thérapeutiques. Plus ce que je raconte semble loin, plus l’effet sera intense. Même dans ce journal : ne pas écrire pour se débarrasser de quoi que ce soit qui serait pesant. Non, l’écriture allège parce qu’elle extrait du monde. Jolie ambivalence de la formule. L’écriture allège par ce qu’elle extrait du monde. “Par ce”, “parce” : juste là, dans cette ambiguïté, il y a du sens.
2/4/22
Les vidéos qui accompagnent le Catalogue 2022 n’intéressent pas grand monde, moins de monde que les textes et demandent un travail un peu ingrat d’enregistrement, de montage, et de mise en ligne. Peut-être le format n’est-il pas attrayant, ou le contenu, ou les deux. Mais certaines, sur YouTube, malgré 190 abonnés, sont vues moins de cinq fois. Pour un travail qui, chaque semaine, demande une bonne demi-journée de mon temps, c’est un résultat, avouons-le, assez mitigé. Pas que j’envisage des foules en liesse, mais tout de même un intérêt un peu plus large. Au fil des semaines, l’algorithme a considéré que je n’étais pas à la hauteur de la concurrence et, vraisemblablement, ne montre plus ces vidéos nulle part. Moi-même, c’est le texte publié sur mon blog que je mets en avant. Sur Instagram, et sur Tik-Tok, les vidéos sont une peu plus vues. Mais très peu de réactions également. Les algorithmes finiront immanquablement par livrer leur verdict. Dans ces conditions, une question : pourquoi continuer ces versions à écouter ? Ce n’est peut-être pas le bon format. Bientôt la centième. L’occasion de m’arrêter ?
4/4/22
Ce qui se passe au jour le jour ressemble à un grand huit de la motivation. Un jour se dire qu’on pourrait tout arrêter, le lendemain, parler du Catalogue 2022 et m’apercevoir qu’il plait. La seule question qui vaille, pourquoi avoir besoin que ça plaise pour continuer ? Ce qui dit aussi pourquoi je fais ça, pourquoi j’écris : parce que le retour m’est agréable. Et si j’étais en thérapie je raconterai peut-être comment, enfant, j’avais gagné une place à part en étant celui qui donne à lire ses poèmes à des adultes qui s’en émerveillaient, et qui peut-être m’aimaient pour ça. Alors, continuer à écrire, non ? Encore. Et le vivre comme un signal envoyé aux autres. Pour qu’on m’aime ? Allons, je sais la vanité de ça. Et que ça m’a empêché d’écrire aussi, forcément. De crainte qu’on ne m’aime pas. C’est logique. Merci pour la séance, docteur. Je vous dois combien ?