Il y aurait au milieu des poèmes
Un texte comme un trou noir
Dont il vaudrait mieux sauter la page
Que les plus prudents éviteraient de lire
Un poème trou noir aux abysses effroyables
Un poème sans fond
Où se noyer
S’étouffer
Se perdre
Il serait en plein milieu du livre comme un piège
Une fois qu’on l’aurait lu on aurait lu tous les poèmes
On aurait lu tous les poètes
Les plus tristes les plus désespérés
Les maudits
Les écartelés les morts d’amour les pendus les fous les syphilitiques
Ceux jetés sous les trains par les fenêtres du haut des falaises
Au fond de leurs yeux vides les derniers feux follets de mots finissant de les consumer
Les rimailleurs aux poumons gorgés de sel rejetés par la mer
Il y aurait ce poème qu’on vous aurait recommandé de ne pas lire
Et que vous liriez pour ça
Jusqu’à votre propre suffoquement